Cellules souches : le premier atlas cellulaire de dents humaines au monde

Des chercheurs suisses ont cartographié le premier atlas complet des cellules individuelles qui composent les dents humaines. Leurs travaux donnent de nouveaux espoirs pour des traitements dentaires basés sur les cellules souches.

Par Raphaëlle de Tappie, publié le 01 mai 2021

Cellules souches : le premier atlas cellulaire de dents humaines au monde

Depuis des décennies, des chercheurs travaillent à combiner des approches génétiques et de régénération cellulaire. Ils essayent de comprendre comment aider les tissus et les organes blessés à guérir tandis que d’autres essayent de mettre au point des protocoles solides qui s’appliqueraient à toutes les cellules souches. En 2016, des scientifiques du monde entier ont lancé le projet Human Cell Atlas (HCA) (Atlas des cellules humaines) qui vise à cartographier toutes les cellules du corps humain afin d’aider à une meilleure compréhension de la santé humaine et les recherches en diagnostic, suivi et traitement des maladies.

Aujourd’hui, pour la première fois au monde, des scientifiques suisses ont réussi à créer un atlas unicellulaire de dents humaines. Les résultats de leur étude, parus dans la revue Science, aident à mieux appréhender l’identité cellulaire et moléculaire des tissus dentaire humains. À terme, leurs découvertes pourraient ouvrir de nouvelles voies pour les approches thérapeutiques dentaires basées sur les cellules souches.

Une équipe de chercheurs dirigée par Thimios Mitsiadis, professeur à l’Institut de biologie orale de l’Université de Zurich, et Andreas Moor, professeur au Département de science et d’ingénierie des biosystèmes de l’ETH Zurich, a mis en lumière une grande hétérogénéité cellulaire dans la pulpe dentaire et le parodonte. Pour ce faire, ils ont utilisé une technologie de séquençage unicellulaire pour différencier chaque cellule intégrée à la pulpe dentaire et au parodonte. “L’utilisation de l’informatique nous a permis de voir sous chaque cellule de l’organe dentaire”, explique Thimios Mitsiadis à la (RTS).

“Un grand potentiel de régénération”

“Notre étude fournit une compréhension sans précédent de la composition de ces deux tissus, qui sont sujets à des pathologies spécifiques à la dent et liées à des bactéries, comme les caries et les parodontites. La pulpe dentaire et le parodonte contiennent tous deux des cellules souches qui possèdent un grand potentiel de régénération”, explique quant à lui le premier coauteur Pierfrancesco Pagella, chercheur principal dans l’équipe de Mitsiadis dans l’article paru dans Science.

Sans s’y attendre, les chercheurs ont découvert que les signatures moléculaires des populations de cellules souches se ressemblaient beaucoup. “Nous pensons que leur comportement différent est peut-être dû à leur microenvironnement distinct. Nos résultats suggèrent que la spécificité du microenvironnement est la source potentielle des différences fonctionnelles significatives des cellules souches situées dans les divers compartiments de la dent”, poursuit Pagella.

“Les approches unicellulaires peuvent nous aider à comprendre les interactions entre la pulpe dentaire et les cellules parodontales impliquées dans les réponses immunitaires lors d’agressions bactériennes. Par conséquent, l’analyse unicellulaire pourrait être utile à des fins de diagnostic pour favoriser la détection précoce des maladies dentaires“, développe le dernier auteur, Thimios Mitsiadis.

Des traitements plus précis ?

En effet, ces découvertes pourraient conduire à des traitements dentaires plus appropriés, à une régénération réussie des parties endommagées des dents et des outils de diagnostic encore plus précis pour les patients souffrant de pathologies dentaires.

“Au niveau des cancers de la bouche, il y a des cellules souches cancéreuses qu’on ne peut pas voir mais que l’on pourra peut-être détecter grâce à cet outil, alors qu’elles ne sont pas encore très nombreuses. (…) Pour ce qui est de la question de la régénération des parties cellulaires des parties endommagées des dents, avoir un atlas pourrait permettre de mieux les traiter. S’il faut construire un organe, il faut avoir accès à toutes les cellules en jeu.”, détaille Mitsiadis auprès de la RTS.

Trois personnes sur quatre sont atteintes d’une maladie parodontale au cours de leur vie. La parodontite serait par ailleurs responsable de 70 % des pertes dentaires chez l’adulte.