Les dents, un outil unique pour comprendre les maladies de l’os

Une équipe de chercheurs en médecine dentaire a reproduit les anomalies dentaires causées par le rachitisme hypophosphatémique grâce à un modèle de culture original reproduisant la minéralisation de la dent.

Par la rédaction, publié le 21 mai 2013

Les dents, un outil unique pour comprendre les maladies de l’os

Cette maladie rare est caractérisée par des troubles de la croissance et par de sévères infections dentaires, tous deux liés à une mauvaise minéralisation de l’os et de la dentine. Les scientifiques ont étudié les mécanismes complexes à l’origine des malformations dentaires, en utilisant des cellules souches mésenchymateuses contenues dans la pulpe dentaire et normalement impliquées dans la minéralisation des dents.

Les chercheurs ont tout d’abord identifié le peptide ASARM, responsable de l’hypominéralisation des os et de la dentine, dans des dents de patients hypophosphatémiques. Ce peptide entraîne une anomalie de structure des dents qui s’infectent alors très facilement, sans signe clinique préalable. « Afin d’étudier les mécanismes impliquant ce peptide dans la maladie, nous avons mis au point un modèle dentaire tridimensionnel», explique Catherine Chaussain, Professeur à l’Université Paris Descartes et Praticien Hospitalier à l’Hôpital Bretonneau (AP-HP).

L’étude montre que les cellules souches de la pulpe dentaire humaine traitées par ASARM ne se différencient pas normalement en odontoblastes, entravant la minéralisation normale des dents. L’hypominéralisation des os et des dents semble donc avoir la même origine dans le rachitisme hypophosphatémique. Une étude préclinique chez l’animal alliant des techniques d’imagerie par micro-CT et des approches histologiques a confirmé ces résultats.

Minéralisation témoin/patient

Le rachitisme hypophosphatémique est principalement lié à une mutation du gène PHEX. Ce dernier code une enzyme capable de dégrader le peptide ASARM, puissant inhibiteur de la biominéralisation et hypophosphatémiant, dérivé du clivage de la protéine dentinaire et osseuse MEPE. La mutation de PHEX entraîne une libération accrue de ces peptides ASARM. En leur présence, la différenciation des odontoblastes est altérée, ce qui diminue localement la minéralisation des dents.

De plus, les scientifiques émettent l’hypothèse d’un rétrocontrôle positif d’ASARM sur la synthèse de MEPE, provoquant ainsi un cercle vicieux par amplification du mécanisme pathologique. ASARM apparaît donc comme un acteur clé de la pathologie et explique les infections dentaires observées chez les malades.

« C’est la première fois qu’un modèle dentaire est utilisé pour étudier des maladies de l’os, indique Benjamin Salmon, Maître de conférence à l’Université Paris Descartes et Praticien Hospitalier à l’Hôpital Louis Mourier.L’atout majeur de cette technique est de disposer d’un matériel accessible, les cellules dentaires des malades pouvant facilement être recueillies (perte des dents de lait, extraction des dents de sagesse…). À l’avenir, cette approche pourra être utilisée pour étudier d’autres maladies rares de l’os ».