Mal de dos : un mal de plus en plus présent chez les salariés français

D'après une nouvelle enquête Ifop, le mal de dos s'est largement généralisé chez les salariés français, surtout les femmes, depuis le développement du télétravail.

Par Raphaëlle de Tappie, publié le 27 janvier 2023

Mal de dos : un mal de plus en plus présent chez les salariés français

Les troubles musculosquelettiques (TMS) représentent la première cause de maladies professionnelles indemnisées avec 88 % des maladies professionnelles reconnues par le régime général : 44 492 cas en 2019. Et, selon une étude parue ce mois-ci, réalisée pour l’Ifop pour Percko, société qui propose des produits et vêtements pour soulager le mal de dos, cela ne risque pas de s’arranger : en effet, le télétravail aurait largement aggravé le mal de dos. A tel point que 73 % des salariés demandent aujourd’hui une meilleure prise en charge des équipements des télétravailleurs par leurs entreprises. Une réalité d’autant plus forte chez les plus concernés : télétravailleurs à temps partiel (81 %) ou encore cadres (79 %) et salariés des catégories aisées (80 %).

Entre 2010 et 2022, la proportion de salariés souffrant au moins un TMS est passé de 72 à 86 %. Le mal de dos reste le trouble le plus répandu (69 %), devant les douleurs liées à la nuque (58 %), au genou (38 %), au poignet (30 %) et au coude (15 %). 77 % de ces salariés attribuent ces douleurs à leur travail, surtout ceux qui souffrent quotidiennement du dos (86 %). Sans surprise, les personnes blâmant leur profession sont surreprésentées chez les travailleurs manuels (89 %) et les télétravailleurs à temps complet (93 %). Au niveau du genre, il semblerait que les femmes soient plus impactées. Ainsi, 38 % d’entre elles souffriraient du dos au moins une fois par semaine contre 27 % des hommes.

Pour certains, le mal de dos est tel qu’ils ont déjà rencontré des difficultés à accomplir des missions professionnelles (46 %). Malheureusement, si les TMS sont un problème de santé publique qui coûte beaucoup à la sécurité sociale, 42 % des personnes atteintes de cette affliction ont déjà renoncé à demander un arrêt à leur supérieur alors qu’elles auraient dû. Un phénomène d’autant plus prononcé chez les personnes en situation de précarité : 60 % des salariés « pauvres » n’osent pas le faire. Car il faut dire que les entreprises restent encore peu mobilisées sur la question. Ainsi, 60 % des salariés travaillant à distance estiment que leur compagnie n’investit pas assez dans du matériel ergonomique tandis que 47 % des salariés jugent également cela insuffisant sur le lieu de travail.

Des répercussions physiques et psychologiques

Pourtant, le mal de dos est loin d’être bénin. Il n’impacte pas que les compétences professionnelles mais également l’état de santé physique (64 %) et psychologique (59 %) des salariés concernés. Ainsi, il nuirait à 42 % à leur vie sociale et à 33 % à la vie sexuelle.

 « Les douleurs de dos sont handicapantes puisqu’elles limitent les salariés à tout niveau et à tout moment, tant au travail que dans leur vie personnelle. Mais l’intérêt de l’étude est de montrer que ces douleurs physiques causent aussi une souffrance émotionnelle très forte, avec une appréhension constante et une charge mentale qui est d’autant plus dure à porter qu’il existe une peur de la stigmatisation. Quatre salariés sur 10 pensent en effet que leur mal de dos est sous-estimé par leurs managers, et 60 % des salariés les plus précaires n’osent pas demander des arrêts de travail pour ce motif », analyse Quentin Perraudeau, co-fondateur de Percko.

Gautier Jardon, chargé d’études senior au pôle « Actualités et politique » de l’Ifop renchérit : « Trouvant leur origine dans des facteurs à la fois physiques (âge, sexe, diabète, obésité…) et professionnels (mouvements répétitifs, stress…), les TMS représentent un problème de santé publique contre lesquels les pouvoirs publics s’efforcent d’agir depuis longtemps. L’intérêt de cette étude est de montrer que des troubles comme le mal de dos sont loin d’être en recul ni d’être l’apanage des travailleurs manuels : un nouveau facteur aggravant issu de l’évolution des métiers, le télétravail, semble en effet jouer sur la prévalence de ce genre de souffrance qui affecte pourtant fortement la vie professionnelle et personnelle des salariés… De même, force est de constater que le mal de dos apparaît comme un « mal bien féminin », notamment en raison de la plus forte exposition de la gent féminine au stress et de certaines tâches parentales (ex : port d’enfant). Dans ce contexte, les attentes des salariés s’avèrent fortes envers les entreprises – légalement chargées de leur garantir santé et sécurité au travail – pour financer en matériel adéquat les télétravailleurs (siège ergonomique…) et ceci, d’autant plus dans un contexte où le plan de sobriété énergétique les encourage à généraliser le travail à distance. »

Les TMS sont un problème qui touchent particulièrement les chirurgiens-dentistes de par la position dans laquelle ils se trouvent au quotidien. Selon une enquête réalisée par le Dr Julien Denni en 2018 dans le cadre de sa thèse, sur 1 000 praticiens de moins de 35 ans pour la plupart, 78 % déclarent souffrir de douleurs chroniques et 19 % disent n’avoir pu travailler au moins une fois à cause de celles-ci.

Etude Ifop pour Percko, réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 6 au 8 décembre 2022 auprès d’un échantillon de 1004 personnes, représentatif des salariés français.