" Construire son cabinet en fonction de ses objectifs "

 

Pour le Dr Ronen Kurower, coauteur du livre " Créer, gérer, développer un cabinet de groupe ", la confiance dans ses collaborateurs est la clé du succès.  

Propos recueillis par Agnès Taupin, publié le 30 mars 2023

” Construire son cabinet en fonction de ses objectifs “

Dentaire365 : Fondateur et gérant d’un cabinet dentaire de 21 personnes, quelle est pour vous la dimension la plus importante dans un cabinet de groupe ? 

Dr Ronen Kurower : La dimension la plus importante est la confiance et c’est aussi la clé du succès. Il faut avoir confiance en l’autre, dans ses associés et ses salariés. Beaucoup de personnes craignent d’avoir des problèmes en embauchant, mais même s’il cela peut arriver, il faut continuer à faire confiance. Il faut aussi avoir l’envie, notamment d’avoir des salariés, et aimer travailler en équipe. Il faut également avoir un esprit entrepreneurial, une vision de l’avenir de son cabinet et se former en communication, management et organisation.

Cela ne suffit donc pas d’être bien entouré…

Pour être bien entouré, il faut savoir sélectionner. Les personnes qui montent des cabinets de groupe lisent des livres dans le domaine entrepreneurial et ont généralement suivi beaucoup de formations, cliniques, mais aussi dans d’autres disciplines.

J’ai construit cet esprit d’entrepreneur peu à peu, à la suite de frustrations. Lorsque j’ai commencé à exercer, je me suis rendu compte qu’il me manquait quelque chose, le côté création d’entreprise. Au bout de quelques années, je me suis aperçu que je ne pouvais me contenter d’avoir un cabinet dentaire avec uniquement une assistante et une secrétaire.

Quelle est votre définition d’un cabinet de groupe ?

C’est un cabinet d’au moins trois ou quatre personnes : le praticien, un collaborateur, une assistante et une secrétaire. Mais il peut compter un effectif bien supérieur, j’ai en tête l’exemple d’un confrère qui dirige un cabinet de 50 personnes.

Comment définir la taille de son cabinet dentaire de groupe ?

Cela dépend de ses envies. Mon équipe compte 21 personnes, mais je ne me suis pas dit il y a dix ans que j’allais avoir un cabinet avec une taille définie. Un cabinet dentaire de groupe se développe au fil du temps et cela dépend aussi de la taille de ses locaux. La personnalité du créateur entre en jeu également. Certains chirurgiens-dentistes conservent la même taille de cabinet et d’autres embauchent tous les ans. Cela dépend de ses objectifs et de la vision de son cabinet.

Dans un chapitre de votre livre il est question de clarifier les objectifs de son cabinet. Quels peuvent être ceux-ci ?

Pour certains, c’est une augmentation de son chiffre d’affaires, pour d’autres le fait de créer une entreprise. Certains praticiens vont vouloir la qualité de vie la plus agréable possible et travailler seulement trois jours par semaine. Il faut construire son cabinet en fonction de ses objectifs. Sinon, on ne se trouve pas aligné avec ses envies et sa vision et c’est alors que l’on peut penser ne pas être à sa place ou se sentir déprimé.

Cela ajoute-t-il une charge de travail, en termes de gestion notamment ?

Sauf si vous embauchez une personne qui assure la gestion pour vous… Je suis en pleine restructuration en ce moment. J’ai envie de lever le pied, mais la gestion du personnel et de la communication doit être assurée. Je vais embaucher un collaborateur qui va gérer l’équipe et la communication du cabinet, ainsi que la comptabilité.

Il ne faut pas laisser le hasard décider de son image de marque “.

Il faut pouvoir se détacher de ses responsabilités dans ce cas, ce qui peut ne pas être facile…

Beaucoup de confrères aiment bien tout contrôler, auquel cas cela peut être difficile de déléguer. Pour ma part, je n’ai pas de mal à le faire.  

Vous parlez d’image de marque dans votre livre coécrit avec Edmond Binhas. Quels sont les principaux éléments de l’image de marque d’un cabinet dentaire ?

En quels termes souhaite-t-on que les gens parlent du cabinet ? Nous devons réaliser le travail nécessaire pour que les gens expriment ce que l’on souhaiterait entendre, par exemple un cabinet dentaire moderne, à la pointe de la technologie, ultra-propre, il faut mettre tout en œuvre pour que cela le soit vraiment. Certains peuvent vouloir un cabinet cocooning où les gens se sentent comme à la maison. L’image de marque d’un cabinet dentaire se crée de A à Z : depuis le téléphone pour les rendez-vous, l’accueil, le temps au fauteuil, jusqu’à l’appel des patients après un soin important pour prendre de leurs nouvelles. Il ne faut pas laisser le hasard décider de son image de marque.

On voit des cabinets dentaires intégrer un laboratoire de prothèses en leur sein. Quel est l’intérêt ?

Je suis actuellement dans la phase de création d’un laboratoire de prothèses pour plusieurs raisons. Nous avons des frais de laboratoire conséquents. D’autre part à l’heure actuelle beaucoup de laboratoires de prothèses sont débordés. On constate soit des délais supérieurs, soit une baisse de qualité. Avoir un laboratoire de prothèses permet de contrôler les délais et la qualité. Cela peut permettre de tout rationnaliser sur place, de faire baisser les coûts, ou d’augmenter son chiffre d’affaires. Cette création passe par l’embauche d’un prothésiste dentaire et l’achat de matériel.

Un cabinet de groupe modifie-t-il la façon d’aborder son exercice ? 

Tout à fait. Avec plusieurs praticiens, on peut choisir son exercice, les soins que l’on préfère réaliser. Étant donné que l’on mutualise les frais, on peut embaucher une personne supplémentaire pour coordonner l’ensemble des tâches administratives. Lorsque l’on se regroupe, cela démultiplie les possibilités. L’avantage d’un cabinet de groupe est que le chiffre d’affaires ne dépend pas que de vous, mais aussi de vos collaborateurs. Aussi, si vous levez un peu le pied, cela ne va pas mettre en péril le cabinet.

Pensez-vous que le cabinet de groupe puisse être une réponse aux centres dentaires ?

J’en suis convaincu depuis très longtemps. C’est pour cette raison que j’ai créé mon cabinet de 700 m2. Lorsque j’ai vu apparaître ces centres dentaires et constaté que les procès contre eux étaient perdus, je me suis dit qu’il fallait rivaliser avec nos moyens : la proximité et la communication avec les gens, la qualité de service et des soins. Ces centres dentaires ont souvent de gros moyens financiers et si l’on n’est pas regroupé entre chirurgiens-dentistes, on ne peut lutter contre eux, car il n’est pas possible d’avoir le même matériel et d’embaucher les mêmes collaborateurs. Notre cabinet dentaire est désormais assez important pour lutter à armes égales.

Comment recrutez-vous vos collaborateurs ?

Nous sommes un cabinet de neuf praticiens orientés dans une discipline (endodontie, parodontologie, implantologie, stomatologie et pédodontie). Nous n’avons pas trop de difficultés à embaucher parce que l’on a suffisamment d’arguments face aux centres dentaires. Lorsque l’on recrute, aussi bien des assistantes que des praticiens, les candidats ont approché auparavant des centres dentaires. Nous leur proposons de beaux locaux, de faire uniquement des soins qualitatifs et d’avoir une assistante au fauteuil. Ces avantages nous permettent d’être concurrentiels par rapport aux centres. Ceux-ci sont gérés par des directeurs ou des financiers, alors que notre cabinet dentaire est dirigé par des chirurgiens-dentistes. Entre praticiens, on se comprend et on s’entraide. L’argent n’est pas notre but, mais la qualité des soins.