Une indemnisation à venir pour les chirurgiens-dentistes

Une partie des dépenses fixes des cabinets dentaires sera prise en charge dans le cadre d’un dispositif dédié aux professionnels de santé, annonce le président de la FSDL, Patrick Solera.

Par Agnès Taupin, publié le 20 avril 2020

Une indemnisation à venir pour les chirurgiens-dentistes

Dentoscope : Une aide spécifique pourra-t-elle bénéficier aux chirurgiens-dentistes dans le cadre de la crise du Covid-19 ?

Dr Patrick Solera, président de la Fédération des syndicats dentaires libéraux : Le directeur général de l’UNCAM nous a informés des mesures qui ont été demandées par le ministre de la Santé Olivier Véran pour mettre en place une indemnisation globale pour tous les professionnels de santé conventionnés, y compris les chirurgiens-dentistes. Il y a une volonté du ministère de l’Économie de prendre en charge par cette indemnisation une partie des dépenses fixes du cabinet pour qu’il n’y ait pas de faillite qui pourrait entraîner un manque de praticiens et donc une perte de chance pour les patients de se faire soigner. Un téléservice va être mis en place auprès duquel le professionnel pourra demander un acompte pour payer une partie de ses charges fixes de mars et d’avril. Cette plateforme sera mise en place vers la fin du mois d’avril et au plus tard au 10 mai. Les sommes seront calculées en fonction du chiffre d’affaires de l’année précédente avec notamment une analyse précise des dépenses fixes qui ont été effectuées, comprenant le loyer et les emprunts, les charges sociales, mais hors consommable et matériel. Il y aura aussi une prise en charge des recettes par rapport aux soins opposables.

Les mesures économiques déjà mises en place par le gouvernement dans le cadre de la crise sanitaire sont-elles suffisantes pour les chirurgiens-dentistes ?

Dr Patrick Solera : Non, ce n’est pas suffisant. Le montant par exemple des indemnités journalières pour garde d’enfant de moins de 16 ans permet de se nourrir mais pas de faire tourner un cabinet. La moyenne des dépenses d’un cabinet se situe entre 10 et 12 000 euros par mois. À l’heure actuelle, si on enlève les consommables, les charges fixes mensuelles sont d’environ 8 000 euros. L’aide pour les entreprises d’un montant de 1 500 euros n’est donc pas suffisante. C’est pour cela que la Caisse de retraite autonome des chirurgiens-dentistes a débloqué une aide exceptionnelle de 4 500 euros qui sera versée automatiquement sur nos comptes bancaires, en trois fois. Un montant de 1 500 euros sera donc versé au mois d’avril, mai et juin. Il y aura aussi un report des prélèvements jusqu’au mois d’octobre. Ces reports seront régularisés l’année prochaine, entre juin 2021 et juin 2022.

D’autre part, les aides d’État mises en place pour les petites entreprises concernent celles dont le bénéfice est inférieur à 60 000 euros, or la moyenne des revenus des cabinets dentaires s’élève à 85 000 euros par an. Seulement 25 % des cabinets se situent en-dessous de cette somme. Les aides ne permettent pas une reprise de l’activité dans de bonnes conditions et la plupart des cabinets souscrivent à l’heure actuelle des prêts bancaires avec le prêt d’État garanti. On incite donc les praticiens à se surendetter pour pouvoir faire face à leurs échéances qui vont intervenir en mai et juin.

Il n’y a pas de soutien de la part des assurances souscrites par les chirurgiens-dentistes ?

Dr Patrick Solera : Il n’y a aucun soutien, car il ne s’agit pas d’une catastrophe naturelle et les contrats ne prennent pas en compte le risque de pandémie. Or, nous sommes dans une situation de perte d’exploitation et nous devrions donc toucher des indemnités journalières. Si à l’avenir nous souscrivons un contrat prenant en compte le risque pandémique, cela entraînera un surcoût en termes de cotisations pour les années qui viennent sans que cela soit certain que ce type de pandémie se reproduise à l’avenir.

Êtes-vous cependant optimiste pour la réouverture des cabinets dentaires le 11 mai ?

Dr Patrick Solera : Non, pour rouvrir le 11 mai, il faut avoir des équipements qui permettent de se protéger, de protéger nos salariés et nos patients. Le conseil national de l’Ordre nous a clairement indiqué que sans équipements il était inconcevable de retourner travailler. Or, d’après les dernières interrogations auprès de nos fournisseurs, ces équipements n’arriveront pas avant début ou mi-juin. Nous n’aurons pas en nombre suffisant de masques FFP2 nécessaires pour nous protéger pour le 11 mai.