Inquiétudes autour de l’interdiction des amalgames dentaires en 2025

Le 17 janvier 2024, le Parlement européen a adopté des amendements dans le cadre de la proposition de règlement de la Commission européenne visant à interdire les amalgames dentaires dès le 1er janvier 2025. Un calendrier qui suscite de nombreuses inquiétudes partout en Europe chez les représentants de la profession.

Par Linda Lam, publié le 22 janvier 2024

Inquiétudes autour de l’interdiction des amalgames dentaires en 2025

Depuis le 14 juillet 2023, la Commission européenne s’est donné l’objectif suivant : l’élimination totale de l’utilisation des amalgames dentaires ainsi que l’interdiction de leur fabrication et de leur exportation depuis l’UE dès le 1er janvier 2025.

Le 17 janvier dernier, le Parlement européen a adopté des amendements dans le cadre de la proposition de règlement de la Commission relative à cette interdiction.

À partir du 1ᵉʳ janvier 2025, le recours aux amalgames devrait être réservé aux seuls cas où le praticien le juge « strictement nécessaire en raison des besoins médicaux spécifiques et dûment justifiés du patient. »

Pour y arriver, l’amendement 16 préconise que « l’abandon progressif des amalgames dentaires devrait s’accompagner d’une formation professionnelle pour les dentistes, selon les besoins, afin de s’adapter aux nouvelles techniques ».

La proposition doit encore être soumise à de nouvelles négociations entre le Parlement européen et le Conseil mais suscite de vives critiques en Allemagne, au Royaume-Uni et en France, notamment quant aux délais de faisabilité du projet.

« Ni réalisable, ni justifiable » pour la British Dental Association

La British Dental Association (BDA) a exprimé de sérieuses réserves concernant le calendrier de l’interdiction des amalgames dentaires par l’UE. Selon la BDA, cette décision, en particulier dans le contexte de services dentaires déjà sous pression au Royaume-Uni et plus particulièrement en Irlande du Nord, est jugée « ni réalisable, ni justifiable » d’ici 2025.

En effet, dans le cadre des dispositions post-Brexit, l’Irlande du Nord devra éliminer progressivement les amalgames sur la même base que les États membres de l’UE. Cette divergence réglementaire signifie que le reste du Royaume-Uni, bien qu’échappant à une interdiction formelle, fera face à des perturbations et à des coûts accrus, dus notamment à l’impact sur les chaînes d’approvisionnement.

La British Dental Association met en avant la nécessité d’une coordination entre les gouvernements du Royaume-Uni et l’ensemble du secteur dentaire pour gérer cette transition. Elle souligne également les implications potentielles sur la qualité et l’accessibilité des soins dentaires, surtout pour les populations les plus vulnérables.

Eddie Crouch, son président a déclaré : « Alors que nous sommes sur le point de perdre une arme essentielle dans le traitement de la carie dentaire, les quatre gouvernements britanniques semblent dormir au volant. Si les matériaux alternatifs ne sont pas compétitifs, cela ajoutera de nouveaux coûts et de nouvelles incertitudes à des exercices déjà au bord du gouffre. Sans une action décisive, ce pourrait être la goutte d’eau qui fait déborder le vase de la dentisterie du NHS [ système de santé publique du Royaume-Uni ]. »

« Intenable et irréaliste » pour l’ONCD

Dans sa Lettre de décembre 2023, le Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes estimait que le calendrier d’interdiction de l’amalgame au 1er janvier 2025 était « intenable et irréaliste ».

Le Conseil national avait ainsi appelé à un report en 2030 (ou du moins, à minima, au 1er janvier 2027) afin de « permettre aux régimes nationaux d’assurance maladie et à la profession de s’adapter à la disparition totale de l’amalgame ».

Pour l’Ordre, l’amalgame dentaire reste « un compromis pertinent » pour soigner les caries entre le budget des patients et la disponibilité des matériaux. L’ONCD exprime de réelles inquiétudes quant aux possibles dangers de certains matériaux alternatifs comme « la libération de nanoparticules ou encore de potentiels effets nocifs des composites dans la cavité buccale ».

Dans cette optique, le Conseil dit se tenir prêt « à participer, aux côtés des autorités de santé françaises, aux travaux de préparation de cette transition à l’échelle nationale pour en tempérer les répercussions sur notre profession ».