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Itinéraire professionnel de deux sœurs assistantes dentaires

Lorsqu’on parle avec elle pour la première fois, on ne devine pas la timidité maladive qu’elle décrira plus tard. La voix de Mélissa est claire, gaie, ouverte à la conversation. On est bien loin de la description faite par sa sœur aînée de quatre ans, Elsa : « Pour elle, répondre au téléphone était très compliqué ». C’est Elsa qui a tracé la voie vers l’assistanat dentaire. « Je voulais travailler dans le milieu hospitalier, l’aide à la personne, la psychologie », se souvient-elle. Sans diplôme et contrainte de travailler, elle explore plusieurs corps de métier, de la grande distribution à la maroquinerie en passant par un poste en Ehpad, où elle est malheureusement témoin de maltraitances. « Je partage avec ma sœur les mêmes valeurs d’empathie, l’envie de se sentir utile, d’apporter cette goutte de réconfort, de joie dans un moment désagréable. » C’est finalement le classique épluchage de petites annonces qui la mène au secrétariat médical. Au fil de ses recherches, elle se rend compte que le poste d’assistante dentaire est très polyvalent. Non véhiculée, elle envoie sa candidature spontanée à différents cabinets de Mâcon (Saône-et-Loire). Le Dr Pacquelet l’appelle pour un entretien puis un essai. Le contrat d’insertion via Pôle emploi lui offre l’opportunité de continuer à percevoir le chômage tout en faisant ses preuves en découvrant le métier pendant trois semaines. L’expérience se déroule très bien et Johanna Pacquelet lui propose un contrat de professionnalisation. « Même si elle n’était pas en recherche d’une nouvelle assistante, je pense que c’était le bon moment pour elle », analyse Elsa a posteriori. Le cabinet compte quatre praticiens, une secrétaire et quatre assistantes, dont une était en formation lorsqu’Elsa a intégré l’équipe. « Les praticiens sont très empathiques, ils se forment continuellement. Ils sont passionnés, très investis et partagent généreusement ce qu’ils ont appris eux-mêmes. Je pense que c’est pour cela que ça colle bien entre nous, car nous sommes animés par les mêmes valeurs. » Sa période d’essai, commencée en mars 2018, s’achève en janvier 2019. Elsa se forme à la CNQAOS de Lyon. « Le Dr Pacquelet est très protocolaire donc ce que l’on apprenait en cours était très proche de notre pratique au cabinet. Cela m’a d’ailleurs donné une longueur d’avance et a facilité l’apprentissage théorique. »

Un fort esprit d’équipe

Pendant ce temps, Mélissa est employée au service nettoyage de l’hôpital de Mâcon. Pour compléter ses heures de travail, elle est embauchée au cabinet dentaire d’Elsa pour le ménage, tous les soirs de 19 h à 21 h, pendant deux ans. Quand l’hôpital met fin à son contrat, le Dr Pacquelet lui propose de créer un poste « ménage et administratif » en plus. Elle qui n’avait jamais pensé franchir le pas malgré de nombreuses discussions avec sa sœur au sujet de son travail, intègre alors pleinement le cabinet. « Le frein principal était son manque de confiance en elle. Elle ne se sentait pas capable de gérer le stress et… de répondre au téléphone. Cela lui paraissait insurmontable. Le contact avec les patients et le travail à quatre mains lui faisaient peur. Alors qu’en réalité, elle est très sociable. Mais si la personne ne se trouve pas en face d’elle, ça devient compliqué. Un patient très sec et elle perdait vite ses moyens, elle avait peur de mal faire », se souvient Elsa. Mais progressivement, Mélissa prend ses marques. Elle témoigne : « J’ai été très touchée qu’ils me fassent confiance, ça m’a portée, je me suis lancée ». La jeune femme commence en tant qu’aide dentaire, évitant ainsi le contact au téléphone, puis petit à petit, passe au fauteuil, pour l’aspiration, quelques tâches de stérilisation, de secrétariat, des confirmations de rendez-vous. « Lorsque je devais téléphoner, je m’enfermais dans une pièce. » Bien décidée à ne pas laisser passer cette belle opportunité, elle prend sur elle pendant sept mois, encouragée par les boutades bienveillantes de ses collègues. « Notre cabinet est animé par un grand esprit d’équipe », insiste Mélissa. Une fois par mois, le groupe se réunit. « Le Dr Pacquelet veut vraiment que l’on se sente bien, que la communication soit fluide. » De la propre initiative du Dr Pacquelet, une coach de vie est intervenue à plusieurs reprises au cabinet. « Elle nous écoute individuellement. Avec elle, on ose aborder tous les sujets. » Motivée par tous ces paramètres, Mélissa s’inscrit finalement à la formation d’assistante dentaire en décembre 2021. Pas peu fière, elle obtient son diplôme dix-huit mois plus tard.

« Nous sommes des miroirs »

Soulagée d’accéder à une stabilité professionnelle, Mélissa est également ravie de travailler avec sa sœur, avec qui elle a toujours pensé monter un projet. « Nous sommes fusionnelles. Je suis malheureuse quand je ne la vois pas. On se comprend et on n’est jamais dans la concurrence. Nous sommes des miroirs. » « On travaille de la même façon, nous sommes les deux seules gauchères du cabinet », clament les deux sœurs à l’unisson. « C’est ma mini-moi professionnelle », abonde l’aînée qui, elle, cinq ans plus tard, est toujours passionnée par son métier et a toujours soif d’apprendre. « Nous, assistantes, nous employons à rester à jour au niveau technique, à évoluer en même temps que les praticiens ». ADF, facettes dentaires, greffe tunnel, formations informatiques pour mieux maîtriser les logiciels… Si elle est actuellement en congé maternité, Elsa a hâte de retourner au cabinet. Pour retrouver son travail et ses collègues bien sûr, mais surtout sa sœur.


Leurs conseils aux praticiens

• Un bon praticien doit avoir beaucoup d’empathie, une approche très souple et très agréable de la relation avec ses patients. Beaucoup d’entre eux gardent un souvenir douloureux de leurs dentistes. Communication, écoute, patience, ce métier requiert beaucoup de qualités humaines. Nous sommes des éponges. Certaines classes sociales veulent se faire soigner mais n’en ont pas forcément les moyens. Quand on extrait l’ensemble d’une dentition, on exerce une emprise psychologique sur le patient. C’est une enveloppe globale avec les peurs, les doutes, l’aspect financier. Il faut avoir tout cela en tête.

• Organiser une réunion régulière au sein de l’équipe.

• Soigner l’accueil. Ne pas craindre les couleurs sur les blouses ou les calots ! Faire appel à un coach : « C’est un petit plus qui permet de mettre des mots sur de possibles conflits internes, de trouver des solutions ou d’améliorer les conditions car on passe énormément de temps ensemble. »