La bactérie buccale P. gingivalis aggraverait les dommages causés par une crise cardiaque

Des chercheurs japonais ont établi un nouveau lien entre les maladies parodontales et cardiovasculaires : le Porphyromonas gingivalis, un agent pathogène oral, pourrait aggraver les dommages engendrés par un infarctus du myocarde.

Par Linda Lam, publié le 11 décembre 2023

La bactérie buccale P. gingivalis aggraverait les dommages causés par une crise cardiaque

Une récente étude de l’Université médicale et dentaire de Tokyo vient de mettre en lumière le rôle du Porphyromonas gingivalis, une bactérie orale, comme catalyseur dans la détérioration du muscle cardiaque après un infarctus.

P. gingivalis et « fragilité cardiaque »

Dans la littérature scientifique, plusieurs études ont déjà prouvé la relation entre la maladie parodontale et la maladie d’Alzheimer.

Et si certaines bactéries, responsables des affections des gencives, pouvaient aussi compromettre la guérison du muscle cardiaque endommagé après un infarctus ? C’est ce que vient de démontrer une étude, intitulée “Porphyromonas gingivalis, a periodontal pathogen, impairs post-infarcted myocardium by inhibiting autophagosome-lysosome fusion”, publiée dans l’International Journal of oral Science, le 18 septembre 2023.

Selon son auteur, le Dr Yuka Shiheido-Watanabe, la bactérie P. gingivalis, présente dans 86 % des cas de maladies parodontales chroniques, « exacerbe la fragilité du myocarde après un infarctus ». Mais « les mécanismes sous-jacents à cet effet restent inconnus ».

L’impact de la gingipaïne, une protéine clé

Les chercheurs se sont penchés sur la gingipaïne, une protéine produite par la bactérie et connue comme un « facteur de virulence clé » empêchant la mort cellulaire programmée. Pour valider leur hypothèse, ils ont créé une version mutante de P. gingivalis (dépourvue de gingipaïne) pour infecter des cellules cardiaques de souris et de rats.

Le Dr Yasuhiro Maejima, co-auteur de l’étude, a pu observer que les cellules infectées par la variation mutante avaient une viabilité plus élevée et des effets de l’infarctus du myocarde atténués par rapport à celles touchées par la bactérie normale.

Parmi ses conclusions, le Dr Shiheido-Watanabe estime que « l’infection par P. gingivalis produisant de la gingipaïne entraîne une accumulation excessive d’autophagosomes, ce qui peut conduire à un dysfonctionnement cellulaire, à la mort cellulaire et finalement à une rupture cardiaque ».

Lien entre maladies parodontales et cardiaques

Les maladies parodontales restent un enjeu de santé publique majeur : classées au sixième rang des affections les plus courantes au niveau mondial, elles affectent plus de la moitié des adultes.

De nombreuses études ont établi que les bactéries présentes dans la bouche pouvaient entraîner des complications cardiaques. Aux États-Unis, des travaux montrent que les enfants souffrant de cardiopathies congénitales pourraient présenter un risque plus élevé d’endocardite infectieuse potentiellement mortelle, du fait de bactéries buccales présentes dans leur sang.

Ces nouveaux résultats soulignent l’importance de traiter efficacement les affections bucco-dentaires pour potentiellement diminuer le risque d’événements cardiovasculaires graves. Parmi les pistes envisagées, réduire son apport calorique pour éviter les maladies parodontales est l’une des solutions avancées par les chercheurs.