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Motivez votre assistante (et prévenez les conflits) grâce à l’analyse transactionnelle

Parmi les innombrables outils empruntés par le management, un semble avoir été ciselé pour le cabinet dentaire : l’analyse transactionnelle. Découvrez « l’AT » et tirez-en (en quelques minutes) le meilleur profit pour optimiser les relations avec votre assistante au quotidien. Simple, efficace… et gratuit.

Par la rédaction, publié le 27 février 2013

Motivez votre assistante (et prévenez les conflits) grâce à l’analyse transactionnelle

Nous attendons d’elles dévouement, organisation, rapidité… mais aussi initiative parfois, compassion, sourire avec les patients et pourquoi pas 4/5e de bonne humeur ? C’est possible, mais pour y arriver, nous allons devoir admettre le bien-fondé de trois ou quatre affirmations. La première est plutôt consensuelle : la proximité quotidienne génère des tensions et du conflit. Si nous ne les avons pas encore constatés, ils sont latents ou se manifestent d’une façon que nous n’identifions pas. La deuxième est moins rationnelle : des faits identiques peuvent avoir des conséquences différentes simplement par la perception que nous en avons. La troisième est beaucoup plus difficile pour qui n’a pas encore managé une équipe, et pourtant : la rémunération est souvent « le » problème, mais jamais « la » solution pour entretenir la motivation au quotidien dans la durée. La quatrième est tout à fait pragmatique : la meilleure façon d’éviter un conflit est d’anticiper. Lorsque les émotions prennent le dessus, le néocortex cède la priorité au cerveau reptilien et il ne reste plus que deux possibilités, fuir ou se battre. Aucune des deux stratégies n’étant particulièrement bonne pour le cabinet… Pour éviter d’en arriver là, intéressons-nous à deux des concepts piliers de l’analyse transactionnelle : les états du moi et les transactions.

Le moi dans tous ses états

Un état du moi est un système cohérent de pensées et de sentiments mis en évidence par un comportement correspondant. Nos états du « ego » sont au nombre de trois (« parent », « enfant », « adulte »), l’ensemble constituant notre personnalité. Nous avons donc chacun ces trois états et les sollicitons en fonction des situations. Notre état du moi « enfant » représente la vie telle que nous l’avons vécue à une étape de notre développement. Nous l’activons lorsque nous « sentons » et agissons comme quand nous étions enfant, par exemple lorsque nous rions, lorsque nous jouons, etc. L’état du moi « parent » correspond à la vie telle qu’on nous l’a enseignée.

Il est en marche lorsque nous « sentons » et agissons comme le faisaient nos parents, quand nous rappelons à l’ordre, quand nous aidons, quand nous expliquons, etc. Enfin, l’état du moi « adulte » est utilisé pour mettre en œuvre les comportements et les conclusions logiques que nous avons tirées de notre propre expérience. Nous sollicitons cet état du « moi » chaque fois que nous pensons et agissons de manière cohérente avec la situation.

Et donc mon assistante dans tout ça ?

Notre parcours et notre éducation nous amènent parfois à « sous-investir » ou « surinvestir » des états du moi. Autrement dit, à réagir en parent alors que l’adulte qui est en nous apporterait une meilleure solution. « Vanina, quand vous aurez fini votre sieste, vous commanderez des gants, ça peut servir, vous savez, je suis orthodontiste ! » Voilà un parent persécuteur et moqueur qui s’adresse à son assistante que nous appellerons jusqu’au bout Vanina (non pas pour ne vexer personne, mais pour vexer seulement les Vanina). Qui n’a pas déjà été tenté par ce type de moqueries ? Mais voilà, l’ironie est un poison dans les relations interpersonnelles et encore plus lorsqu’elle s’adresse à une personne sous votre autorité. Vanina va se sentir, au mieux, infantilisée, et tôt ou tard, réagira comme un enfant. Un enfant, ça fait des bêtises, ça n’est jamais responsable et ça demande de l’affection…

Est-ce vraiment ce que nous attendons d’elle ? Ce déséquilibre peut être pathologique. Si un état du « moi » est totalement phagocyté, l’individu devient inadapté. Mais le plus souvent, c’est bien heureux, nous avons la possibilité de choisir notre état du « moi » dominant dans un contexte et une relation donnée. Il est plutôt conseillé de dire ici « Vanina, j’ai vu qu’il n’y avait plus beaucoup de gants en réserve, vous en commanderez dès aujourd’hui s’il vous plaît ». Parlons de faits, en qualité d’adulte, nul besoin d’asseoir une domination qui nous est structurellement acquise et Vanina se fera elle-même le reproche si elle a pris du retard dans la gestion du stock.

Des transactions efficaces

La transaction, second pilier de l’analyse transactionnelle, désigne simplement l’échange de signes verbaux ou non verbaux entre deux personnes. Dans le modèle de l’analyse transactionnelle, et c’est là toute sa beauté, il est relativement facile de repérer quelle partie de votre « moi » émet, et quelle partie du « moi » de votre assistante répond. À partir de là, si la transaction est simple ou complémentaire (l’état du moi « visé » est celui qui répond), la communication passe bien. Par exemple, « Vanina, pouvez-vous me rappeler l’heure du dernier rendez-vous ? », « Le dernier rendez-vous est prévu pour 19 heures ». Ici l’adulte s’adresse à l’adulte qui lui répond. Pas d’émotion, pas de perturbation… Ce fonctionnement est idéal dans un contexte managérial.

Mais comme nous ne sommes pas tous de parfaits managers, nous usons parfois de transactions simples qui sollicitent d’autres états que l’adulte. Sont-elles pour autant nuisibles à la communication ? Non. Par exemple, pour la même scène… « Vanina, ma petite, pouvez-vous me rappeler l’heure du dernier rendez-vous ? », « Bien sûr docteur, le dernier rendez-vous est prévu pour 19 heures avec Madame Simone». Ici, c’est votre parent (positif) qui s’adresse à l’enfant de Vanina, et c’est bien l’enfant (adapté) qui lui répond en allant au-delà de la demande pour satisfaire le parent qui l’a sollicité.

Si la différence d’âge le permet et que chacun y trouve son compte, ce mode relationnel entre le praticien et son assistante peut tout à fait fonctionner durablement (du moment que les conjoints n’assistent pas à la scène !). Cela dit, il pourra être confortable, mais ne sera pas propice au développement personnel de Vanina et à sa prise d’initiatives.

Quand les transactions s’emmêlent

Quand les transactions se croisent, que l’état du moi « visé » n’est pas celui qui répond, la communication est perturbée. « Vanina, pouvez-vous me rappeler l’heure du dernier rendez-vous ? », « C’est pour 19 heures, je vous l’ai déjà dit (souriante). Docteur vous ne m’écoutez plus ! ». Ici l’adulte s’adresse à l’adulte, mais c’est l’enfant qui lui répond. L’enfant dit « Je n’ai plus ton attention, aime-moi s’il te plaît… ».

Certes, rien de bien méchant, mais rapidement, si chaque fois que nous lui faisons répéter quelque chose elle en profite pour glisser « Papa s’il te plaît amène moi au manège », cela risque rapidement de devenir pesant ! Plus douloureux, si nous revoyons l’affectueux « Vanina, ma petite, pouvez-vous me rappeler l’heure du dernier rendez-vous ? », « C’est pour 19 heures, et à 35 ans, les gens ne sont plus vraiment des gamins ! ». Même dit avec courtoisie et sans haine, et même si fondamentalement Vanina n’a pas tort, vous avez bien senti que l’enfant sollicité n’a pas répondu, mais que c’est le « parent » de Vanina qui vous a rappelé à l’ordre.

Des transactions au conflit…

… il n’y a qu’un pas. C’est très simple à comprendre lorsque les propos sont plus ou moins agressifs, « Vanina, quelle heure est-il ? », « Vous n’avez pas les moyens d’acheter une montre ! », « À 50 ans un type qui n’a pas une Rolex a raté sa vie, alors un dentiste qui n’a même pas une Swatch ! ». L’adulte demande l’heure, l’enfant rebelle répond, fin de la communication et conflit. Mais dans le cas plus subtil de « Vanina, quelle heure est-il ? », « Bien sûr, docteur, tout de suite… 15 h 30, mais vous savez quoi, je vais vous amener une des montres de mon mari, il ne l’utilise plus en attendant que vous ayez la vôtre ».

D’accord, le trait est volontairement forcé et ce cas de figure ne se rencontre pas tous les jours, mais c’est pour l’exemple. L’adulte que nous sommes s’adresse à l’adulte Vanina. Mais elle, certes bienveillante, va bien au-delà de la demande et répond via son « parent protecteur ». Pas de grands malheurs immédiats à redouter, mais le problème est que l’on s’habitue dans un contexte donné à un mode de transaction privilégié. Et que si nous n’avons pas d’objection à ce que notre mère fasse notre quatre heures, nous allons forcément mal vivre que notre assistante nous assiste au-delà du protocole professionnel.

Tôt ou tard, directement ou pas, nous finirons par le lui dire avec ou sans les mots : « Mêlez-vous de vos affaires, vous n’êtes pas ma mère ! » Sans s’en rendre compte, la réaction en chaîne aura démarré. « Avec tout ce que je fais pour lui, ça l’arrangeait bien quand je le maternais et là il en a marre de moi, etc. »… Bref, que l’on appelle « la gueule » s’installe, puis la rancune, le montage de bourrichon et ainsi de suite jusqu’à l’explosion.

Un sniper émotionnel

Jusqu’ici, nous avons vu des transactions qui peuvent être inefficaces, nuisibles, mais qui ont cependant deux qualités : elles sont faciles à détecter et – donc – faciles à corriger. Le vrai danger qui guette au cabinet vient des transactions dites cachées. Transactions plus délicates à repérer, elles sont complexes et un seul échange porte deux messages. Un message apparent, les mots prononcés, et un second « sous-entendu ».

Nous voilà légèrement agacés par la lenteur de notre assistante ce jour-là « Vanina, qu’est-ce que vous faites, vous ne rangez pas la radio de Madame Moldus ? », sous-entendu, « Les radios doivent être rangées ! ». Le message apparent va de l’adulte vers l’adulte, mais le message caché va du parent qui rappelle la règle à l’enfant. En soi, ce n’est pas un problème à condition que ce soit voulu et maîtrisé. Parce qu’ici Vanina sait qu’aujourd’hui elle n’est pas à 100 % et que va-t-elle entendre ?

« Il a toujours des reproches à me faire, il ne me dit pas franchement ce qu’il pense… il ne laisse rien passer… » Que nous l’ayons voulu ou pas, elle ne retiendra que le reproche. Il aurait été bien plus efficace d’activer notre adulte et de dire « Vanina, je vois bien que vous n’êtes pas au mieux de votre forme aujourd’hui, cela ira mieux demain ! Pensez à ranger la radio de Madame Moldus ! » Exit le sous-entendu et la transaction cachée qui fait mal, le résultat sera le même sur le plan factuel et bien plus efficient sur le plan émotionnel.

Faites-lui plaisir sans fleur et sans reproche !

Dès que l’émotion intervient, dès qu’il y a une sensation de malaise, de non-dit, de phrase inachevée, il faut désamorcer et tenter de recadrer la relation sur un mode d’adulte à adulte. Cet état sert de tampon entre l’état enfant et l’état parent pour absorber les émotions inadaptées. Ne lui laissons pas entendre des sous-entendus. Exprimons nos reproches clairement, tout comme nos compliments. Il peut s’agir de félicitations directement adressées à sa personne, ou à son travail… tout comme il est possible et sain de critiquer son travail (et non pas de la critiquer en personne… elle le vivrait forcément mal).

Gardons au maximum les transactions parallèles et veillons à ce que le mode de fonctionnement soit sincèrement adapté à notre relation, sachant que celui-ci peut toujours évoluer. Quand les transactions se croisent, la communication s’arrête, recadrons en revenant sur des transactions parallèles via l’état adulte. Si nous reprenons l’exemple de l’adulte que nous sommes qui s’adresse à l’adulte qui certes bienveillante va bien au-delà de sa demande (en voulant prêter la montre), répondons simplement : « C’est aimable de votre part, mais je n’en ai pas besoin, je veux juste savoir l’heure ». Ce n’est pas plus compliqué ! L’adulte essaie de reprendre le dessus en recadrant la relation.

Gérer les transactions cachées

La grande difficulté va être de gérer les transactions cachées. Si Vanina donne l’heure en soupirant, alors là, entendons l’agressivité non-dite « Il n’a pas les moyens d’acheter une montre ! » Dans l’autre sens, c’est le même problème, si nous soupirons parce qu’elle met une seconde de plus que d’habitude pour préparer le plateau ou nous tendre un instrument, nous n’allons pas forcément nous rendre compte de la transaction qui s’est déroulée. Elle l’aura entendu et interprété… sa réaction lui est propre, mais elle ne sera jamais au service d’une relation saine et durable. Si nous commettons (ou si elle commet) ce type d’impairs, il faut immédiatement désamorcer. Assurons-nous que le soupir et le non-dit sont bien ce que nous avons ressenti.

En discutant ouvertement avec Vanina quand le patient est parti pour lui dire ce que nous avons ressenti. Puis en tant qu’adultes, attachons-nous par un questionnement neutre de trouver ensemble des faits. Si le soupir vient d’elle, prenons quelques instants pour l’écouter vraiment (c’est-à-dire en ne réfléchissant pas à nos arguments pendant qu’elle parle). Adressons-nous à elle de façon à ce qu’elle se sente personnellement acceptée, puisque dans le cas contraire, nous n’aurions pas dû la recruter. Pour arriver à cela, il suffit de stimuler un peu notre sensibilité au non verbal et de veiller à exprimer nos propres désirs, nos sentiments et opinions, en étant sûr qu’elle les ait compris.

Le mot de la fin

L’analyse transactionnelle guide la personne vers l’autonomie : une personne autonome accepte la responsabilité de ce qu’elle vit, prend ses décisions en fonction de ses critères personnels et non plus pour s’adapter, vit ses sentiments authentiques et les exprime selon ses choix, perçoit l’autre et elle-même comme une personne qui a le droit d’exister et mérite d’être respectée. La meilleure assistante du monde ne sera-t-elle pas celle qui met son autonomie au service du cabinet ?

Au même prix, la coopération est plus enrichissante que la domination, le statut d’assistante n’est pas en soi une négation ou une limite des qualités individuelles. Alors oui, il est possible d’améliorer facilement, en quelques phrases bien senties et quelques minutes de discussions sincères la vie professionnelle de son assistante et la nôtre. Pour devenir un meilleur manager et du fait, faire de Vanina une meilleure assistante.